IN

 Ne nous laisse pas entrer en tentation

Le « Notre Père », prière enseignée par Jésus à ses disciples, est reconnue par toutes les dénominations chrétiennes comme pouvant volontiers être récitée en commun, encore faut-il s’entendre sur le choix de la traduction. Du côté réformé et évangélique, il n’existe pas de traduction officielle de la Bible. Il en va autrement au sein de l’Eglise catholique. Or la Conférence des évêques de France a décidé de modifier la traduction liturgique de cette prière, proposant de remplacer désormais la phrase « ne nous soumet pas à la tentation », par « ne nous laisse pas entrer en tentation ». La proposition ayant été suivie par la Conférence des évêques suisses, la Conférence des Eglises Réformées de Suisse romande (CER) a demandé et obtenu un report de l’entrée en vigueur de la nouvelle terminologie en Suisse, d’abord prévue fin 2017 et finalement repoussée à Pâques 2018, afin de pouvoir consulter ses Eglises membres.

De son côté, le RES a mandaté sa Commission théologique afin d’émettre une recommandation à ses membres. La Commission théologique ne s’est pas montrée unanime sur la pertinence de cette modification, les uns saluant la nouvelle traduction, estimant que « Dieu ne tente pas » (Ja 1.13), tandis que d’autres ont appuyé le fait que la traduction actuelle s’accorde mieux avec le sens « d’épreuve / mise à l’épreuve » également inclut dans le terme grec peirasmos. Toutefois, la Commission théologique et le Conseil du RES encouragent leurs membres à accepter la nouvelle terminologie afin de permettre à ceux qui le souhaitent de pouvoir réciter cette prière en commun.

***

2 questions à Michael Mutzner, chargé de relations avec les médias pour le RES:

– Le RES a recommandé l’adoption de la nouvelle terminologie. La reformulation de la traduction du Notre Père est-elle un sujet jugé important par les évangéliques suisses ? A-t-il suscité beaucoup de discussions ?

Nous avons abordé le sujet lors de notre rencontre avec les présidents des unions d’Eglises évangéliques CPUE) et les délégués des différents secteurs d’œuvres (CDSO). Ces représentants ont pris note de ce développement avec intérêt et ont soutenu la position du RES. Il n’y a pas tellement eu de débat à ce niveau-là, contrairement à la commission théologique ou là, sur le fond et sur la question de la pertinence de la traduction, les avis divergeaient.

– Selon vous, dans une démarche œcuménique et / ou de prière en commun, est-il important que tous les participants à la prière prient avec les mêmes mots ? Ou bien l’important est-il de croire en que la prière du Notre Père comporte comme affirmations de foi ?

Il arrive déjà maintenant que la prière du « Notre Père » soit priée dans plusieurs langues en même temps (particulièrement dans un pays plurilingue comme la Suisse), autrement dit dans différentes traductions. Ce ne serait donc à mon sens pas catastrophique. Mais en même temps, cette prière est aussi un symbole d’unité, et ne pas la prier avec les mêmes mots reviendrait justement à se démarquer les uns des autres. Ce serait dommage. C’est pour cela qu’il nous semble préférable de faire preuve de souplesse et que nous recommandons d’utiliser les mêmes mots. Pas forcément par conviction théologique pour la nouvelle traduction – de toute manière nous n’avons pas de traduction officielle et unique de la Bible chez les évangéliques – mais plutôt pour que celles et ceux qui le souhaitent puissent réciter cette prière en commun.